Le test du chien

Je commence avec une réflexion sur ce que je pourrais appeler un critère de pertinence. Pour faire simple, un critère de pertinence est un test éliminatoire. Si l’élément évalué passe le test alors il est au moins pertinent. Pas forcément vrai. Pas forcément optimal. Mais il mérite qu’on se penche dessus pour vérifier si la démonstration est juste ou non. Si le critère n’est pas rempli, alors la proposition est mise directement à la poubelle sans autre forme de procès. Par exemple, l’ordre de grandeur est un critère de pertinence en physique : si vous tentez de calculer le rayon de la terre par vos propres moyen et que vous trouvez 253 Km, il n’y a pas besoin de contrôler votre méthodologie. Elle est fausse. Sinon, vous pourriez faire le tour de la terre avec un seul plein. Si vous trouvez 4762 Km, alors votre résultat est à minima pertinent. Cela ne veut pas dire qu’il est correct. Mais que ce n’est pas une perte de temps de se poser la question.

Je rédigerai certainement un article sur les critères de pertinence en science un jour ou l’autre. En attendant en voici un à appliquer à vos idées politiques.

Le test que je vous propose est simple : il s’agit d’une expérience de pensée. Vous avez une opinion précise sur un sujet politique, voici les règles du jeu :

1. Vous avez le pouvoir mettre a exécution votre idée immédiatement, d’un claquement de doigt. Vous pensez qu’il faut construire plus de prisons ? Vous claquez des doigts, et le président de la république lance un projet de loi, le budgète, il est voté par l’assemblé et les travaux commencent. Vous voulez sortir du nucléaire ? Vous claquez des doigts et l’argent est réinvesti dans l’éolien ou ce que vous voulez. Vous êtes contre l’immigration ? Idem.

2. Mais… que vous preniez cette décision ou non, demain, vous échangerez de place avec un individu aléatoire. Sans aucun moyen de prévoir, et encore moins de décider lequel.

Attention, je ne parle pas d’empathie. Il ne s’agit pas de « se mettre à la place de l’autre » pour essayer de comprendre ce qu’il ressent. Demain quand vous vous réveillerez vous ne serez plus vous. Que vous le vouliez ou non. Il s’agit donc de considérer votre opinion en sachant pertinemment que demain vous serez quelqu’un d’autre. Peut-être un homme. Peut-être une femme. Transgenre pourquoi pas ? Hétéro ? Ou pas ? Immigré ? Déclaré ou illégal ? Une star du football ? Un dangereux criminel ? Un violeur ? Un casseur ? Un expert-comptable ? Le chien de votre voisin ?

En tout cas demain vous vous réveillerez dans un autre lit. Si vous possédez un lit.

Maintenant, sachant que vous allez faire cet échange, est-ce que vous êtes toujours prêt, et en toute sincérité, à faire appliquer vos idées politiques ? Si ce n’est pas le cas, alors, celle-ci sont injustes envers tous ceux qui n’ont pas eu de chance. Si elles passent le test, alors on peut commencer à envisager d’en débattre…